[Expo] Mark Rothko - Fondation Louis Vuitton (FLV) - Boulogne - du 18/10/2023 au 02/04/2024

LA VIOLENCE LA PLUS ABSOLUE
La Fondation Louis Vuitton présente une vaste rétrospective des peintures de Mark Rothko. L’expression des émotions humaines fondamentales.

A ceux qui pensent que mes peintures sont sereines, j’aimerais dire que j’ai emprisonné la violence la plus absolue dans chaque centimètre carré de leur surface.

Mark Rothko

L’exposition Mark Rothko à la Fondation Louis Vuitton réunit cent quinze oeuvres. Une rétrospective à ne pas manquer. Nous nous y rendons. Suivez-nous.

 

Mark Rothko, No. 13 (white, red and yellow), 1958

 

La Fondation Louis Vuitton est située à l'ouest de Paris dans le bois de Boulogne, à côté du Jardin d'Acclimatation. Le bâtiment est l'oeuvre de l'architecte Frank Gehry. Il nous tardait de voir cette réalisation de prêt. En lisière du bois, la Fondation ressemble à une gigantesque serre. Des milliers de panneaux de verre courbé surplombant des milliers de panneaux de béton fibré. Nous longeons une cascade qui descend en étages au pied de la structure, donnant l'impression que l'immense serre flotte sur une surface d'eau. Nous atteignons l'entrée juste à l'heure inscrite sur notre réservation et nous entrons aussitôt dans le bâtiment. 

 

 

Nous pénétrons dans un vaste hall. L'exposition retrace l’ensemble de la carrière de Mark Rothko selon un parcours chronologique. Elle se déploie dans les salles jusqu'au dernier étage de la Fondation, ce qui va nous permettre de découvrir l'architecture intérieure du bâtiment.

 

Nous entrons dans la première salle. L’exposition s’ouvre sur la période figurative de l'artiste. Des scènes intimistes, des paysages urbains. Nous ne sommes pas emballés par ces premiers travaux. Lors de la Seconde Guerre mondiale, Mark Rothko s'inspire des mythes antiques et du surréalisme. Là aussi nous passons rapidement dans les salles. À partir de 1946, Rothko se tourne vers l’abstraction. La couleur remplace le dessin, en couches minces et transparentes.

 

Nous montons d'un étage avec un escalier mécanique un peu trop classique à notre goût, qui ne fait pas écho à l'audace architecturale de l'extérieur. Il manque une respiration, un recoin pour méditer.

Nous arrivons dans l'immense Galerie 4. Mark Rothko trouve une voie novatrice dans les années 1950. Nous sommes happés par l'intensité des couleurs des oeuvres. Les formes rectangulaires se superposent, par deux ou trois, dans des tons jaunes, rouges, ocres, oranges, bleus ou blancs.

 

Mark Rothko, No. 10, 1957

 

Les compositions chromatiques sont autant de champs horizontaux dans lesquels nous plongeons notre regard. Les formats de plus en plus grands nous enveloppent. Le ressenti est intime.

Nous apprécions les nombreux bancs mis à disposition. Nous nous asseyons pour contempler certaines oeuvres. Nous voyons que Rothko ne propose pas de titre à ses toiles. Libre à nous de nous immerger dans l'oeuvre, sans autre dialogue.

Derrière la couleur, Rothko cherche la lumière. Chaque toile devient comme luminescente quand nous nous plaçons devant. Elle est tel un objet qui se révèle au contact de l'autre, en interaction avec lui. L'intention sensuelle est là. Nous admirons l'incandescence des champs colorés. Chaque oeuvre rayonne en présence d'une personne et, dans un échange mystérieux, la silhouette du visiteur émerge. 

Mark Rothko No. 9/No.5/No.18, 1952

 

Nous poursuivons notre visite. Dès la fin des années 1950, la palette de Rothko s’assombrit. Les « Seagram Murals » proposent une gravité qui invite à la méditation. L'exposition présente les neuf œuvres de la « Rothko Room » de la Tate Modern de Londres.

Mark Rothko, Untitled (Section 2), 1959

 

Dans la salle suivante, avec les « Blackforms », Rothko explore des tonalités sombres. Il teste la capacité d'un panneau noir à engendrer sa propre lumière. Il faut rester devant les toiles un moment avant que le brun, le rouge et le violet se révèlent à l'oeil. Les ressentis et les émotions qui surgissent alors peuvent être forts. Les sourds contrastes nous abîment dans quelque cataclysme. Rothko transmet le drame humain dans ses aspects les plus violents, dans ses manifestations les plus traumatisantes.

Mark Rothko a dit qu'il peignait « l’éternité infinie de la mort ».

Mark Rothko, No. 3 (green and blue) (untitled), 1957

 

Ces recherches picturales trouveront leur aboutissement dans la Chapelle de Houston. Le spectateur est face à des couleurs sombres, violacées. Dans la lumière diffuse de la chapelle, chacun voit sur la toile ce qu'il y projette, c'est-à-dire ses émotions profondes.

Nous arrivons à la Galerie 7. Il s'agit de trois peintures qui proviennent de la Phillips Collection (Washington, DC).

Nous profitons du changement d'étage pour aérer un peu notre regard sur la terrasse, avec une vue sur l'environnement de la Fondation.

 

Nous entrons dans la galerie 9. Au cours des années 1960, Rothko poursuit ses recherches. Le rouge et le marron sont associés à des bleus profonds. La complexité des accords chromatiques provoque incandescence et immersion. Une superbe salle.

 

Mark Rothko, White and Red, 1962 

 

La galerie 10 propose la série des « Black on Gray », 1969-1970. Cette série se distingue par son austérité, en écho aux sculptures d'Alberto Giacometti. Mark Rothko avait commencé cette série dans le cadre d’une commande non finalisée pour le nouveau bâtiment parisien de l’Unesco.

 

Mark Rothko, Untitled, Black on Gray, 1969

Dans la galerie 11, l'exposition se conclut sur trois oeuvres aux couleurs éclatantes - rose, rouge, orange et bleu.

Cent quinze oeuvres de Mark Rothko, c'est dense. Nous montons sur la dernière terrasse pour regarder l'ossature du bâtiment et les alentours. 

 

 

Nous ressortons conquis par l'oeuvre de Mark Rothko. Voici un art qui vit et respire. Si vous acceptez de l'explorer vous obtenez en retour une lumière ardente. Cette visite c'est une aventure dans une dimension inconnue et intemporelle. Une très belle exposition.