Shoah et bande dessinée - Memorial de la Shoah - Paris - du 19/01/2017 au 07/01/2018
HITLER = SS
L’exposition, dans sa seconde partie, analyse comment les artistes qui n'ont pas été témoins direct ont représenté la Shoah. Le temps de latence est prépondérant. Longtemps la Shoah n'est pas citée en tant que telle. En France La Bête est morte ! de Dancette et Calvo la mentionne dès 1944 mais fait figure d'exception. Qui plus est le traitement visuel est indirect, les protagonistes étant personnalisés par des animaux. Les comics américains se battent contre l'Allemagne nazie mais effleurent seulement le sujet des camps. Peut-être pour ne pas effarer les jeunes soldats avec des horreurs alors impensables. Peut être également pour contourner un antisémitisme alors fort répandu. Dans l’immédiat après-guerre, les bandes dessinées évoquent des camps de concentration dignes de l’enfer, mais les Juifs n’y sont toujours pas. La Shoah n'est de fait pas traitée.
Dès 1944 les reportages des cinéastes qui suivent la progression des armées américaines et anglaises renseignent sur l'horreur des camps de concentration. Il faut cependant attendre 1952 pour voir évoquer la déportation des Juifs de Hongrie vers le centre d’extermination d’Auschwitz, au travers de deux histoires de l'Oncle Paul dans le magazine Spirou. Il faudra ensuite attendre les années quatre vingt pour que la bande dessinée franco-belge revienne sur le sujet de la Shoah.
Aux Etats-Unis, en 1955, Master Race, d’Al Feldstein et Bernard Krigstein, décrit pour la première fois de manière réaliste l’assassinat des Juifs, en huit pages narrant comment le commandant d'un camp est identifié dans le métro new-yorkais après la guerre et poursuivi par une de ses victimes.
L’Histoire des 3 Adolf est narré par le japonais Osamu Tezuka. Il s'agit d'une oeuvre qui met en parallèle l’histoire du Japon et celle de l’Allemagne lors de la Seconde Guerre Mondiale. Ne lésinant pas sur d'haletantes courses poursuites, ce thriller est remarquablement documenté. La responsabilité des japonais dans le conflit n'est pas éludée. Le passage sur les jeunesses hitlériennes est particulièrement instructif. Un manga magnifique.
C'est l'occasion pour le visiteur de l'exposition de découvrir de magnifiques planches originales. Nous savions que Paul Gillon dessinait sur des planches aux dimensions impressionnantes, là nous pouvons en admirer un exemple.
Jean-Marie Gourio et Philippe Vuillemin publient "Hitler = SS" en 1987. La Shoah est traitée sur le ton de l'humour noir. La polémique sera vive et le livre frappé d'interdiction.
Les récits des témoins se multiplient depuis les années 1980. Les auteurs de BD s'emparent du sujet de la Shoah et multiplient les angles de mémoire, tant dans le scénario que dans le dessin. L'artiste peut dorénavant exercer sa sensibilité et aide ainsi à transmettre la mémoire.
Les sujets se diversifient : montée de l’antisémitisme, lois raciales, déportation, spoliation des biens. D'autres génocides sont évoqués, arménien et tutsi. D'autres victimes sont citées : handicapés, gens du voyage, homosexuels.
La dernière partie de l'exposition prend le temps de détailler le sujet, le traitement, l'impact de nombreuses bandes dessinées. Une mine d'analyses pertinentes. Les ouvrages sont à la disposition du visiteur pour la lecture.
Une très belle exposition qui exerce notre esprit critique tout en régalant l'oeil.
Comment montrer l'impensable ? Une exposition nous montre comment la bande dessinée témoigne de la Shoah. Immanquable.
Comment la bande dessinée peut-elle témoigner de la Shoah ? Quelle juxtaposition de dessins et de texte peut évoquer l'extermination par l'Allemagne nazie de six millions de Juifs ? L'exposition au Memorial de la Shoah nous invite à découvrir comment la bande dessinée s'est emparée de ce crime universel. Le sujet proposé est ardu. Le traitement est irréprochable.
Les expositions au Memorial de la Shoah sont d'une richesse documentaire inouïe et l'angle d'attaque est souvent parfait. Une fois de plus, le parcours proposé est épatant. L'exposition interroge les sources visuelles, leur pertinence et leur portée. Les limites de l'exercice sont évoquées avec érudition et dans un langage d'une grande pédagogie.
Nous sommes impressionnés par la quantité de documents, entre comics, bande dessinée franco-belge et mangas.
Juste à l'entrée de l'exposition le mur reproduit en très grand format une baraque de prisonniers, illustration extraite du fameux "Maus". La scénographie est à nouveau superbe. Les planches sont présentées à la bonne hauteur, les commentaires sont parfaitement lisibles, la lumière est adéquate.
La première partie de l’exposition présente les œuvres des témoins directs de la Shoah. Des dessins qui montrent l'horreur du processus d'isolement puis de mise à mort des Juifs d’Europe.
Les expositions au Memorial de la Shoah sont d'une richesse documentaire inouïe et l'angle d'attaque est souvent parfait. Une fois de plus, le parcours proposé est épatant. L'exposition interroge les sources visuelles, leur pertinence et leur portée. Les limites de l'exercice sont évoquées avec érudition et dans un langage d'une grande pédagogie.
Nous sommes impressionnés par la quantité de documents, entre comics, bande dessinée franco-belge et mangas.
Juste à l'entrée de l'exposition le mur reproduit en très grand format une baraque de prisonniers, illustration extraite du fameux "Maus". La scénographie est à nouveau superbe. Les planches sont présentées à la bonne hauteur, les commentaires sont parfaitement lisibles, la lumière est adéquate.
La première partie de l’exposition présente les œuvres des témoins directs de la Shoah. Des dessins qui montrent l'horreur du processus d'isolement puis de mise à mort des Juifs d’Europe.
Dessins de David Olère
L’exposition, dans sa seconde partie, analyse comment les artistes qui n'ont pas été témoins direct ont représenté la Shoah. Le temps de latence est prépondérant. Longtemps la Shoah n'est pas citée en tant que telle. En France La Bête est morte ! de Dancette et Calvo la mentionne dès 1944 mais fait figure d'exception. Qui plus est le traitement visuel est indirect, les protagonistes étant personnalisés par des animaux. Les comics américains se battent contre l'Allemagne nazie mais effleurent seulement le sujet des camps. Peut-être pour ne pas effarer les jeunes soldats avec des horreurs alors impensables. Peut être également pour contourner un antisémitisme alors fort répandu. Dans l’immédiat après-guerre, les bandes dessinées évoquent des camps de concentration dignes de l’enfer, mais les Juifs n’y sont toujours pas. La Shoah n'est de fait pas traitée.
La
Bête est morte !, d’Edmond-François Calvo, Victor Dancette et
Jacques Zimmermann -
Recueil original comprenant les 77 dessins de l'album
Dès 1944 les reportages des cinéastes qui suivent la progression des armées américaines et anglaises renseignent sur l'horreur des camps de concentration. Il faut cependant attendre 1952 pour voir évoquer la déportation des Juifs de Hongrie vers le centre d’extermination d’Auschwitz, au travers de deux histoires de l'Oncle Paul dans le magazine Spirou. Il faudra ensuite attendre les années quatre vingt pour que la bande dessinée franco-belge revienne sur le sujet de la Shoah.
Aux Etats-Unis, en 1955, Master Race, d’Al Feldstein et Bernard Krigstein, décrit pour la première fois de manière réaliste l’assassinat des Juifs, en huit pages narrant comment le commandant d'un camp est identifié dans le métro new-yorkais après la guerre et poursuivi par une de ses victimes.
Master Race - Al Feldstein et Bernard Krigstein, 1955
La shoah va rester longtemps un sujet tabou, dans la bande dessinée et ailleurs. Il faut attendre la fin des années soixante-dix pour que des personnages juifs apparaissent dans la bande dessinée et témoignent de l'amplitude et de la singularité du massacre.
En 1978, le feuilleton télévisé de Marvin J. Chomsky, "Holocaust", marque les esprits.
Joe Kubert fait entrer The Unknown Soldier dans le ghetto de Varsovie.
En 1978, le feuilleton télévisé de Marvin J. Chomsky, "Holocaust", marque les esprits.
Joe Kubert fait entrer The Unknown Soldier dans le ghetto de Varsovie.
En 1980 Art Spiegelman publie Maus, ouvrage qui convoque à la fois la Shoah et le rapport d'un fils avec son père rescapé d'Auschwitz. Le succès est mondial. La bande dessinée est désormais un possible support de mémoire.
L’Histoire des 3 Adolf est narré par le japonais Osamu Tezuka. Il s'agit d'une oeuvre qui met en parallèle l’histoire du Japon et celle de l’Allemagne lors de la Seconde Guerre Mondiale. Ne lésinant pas sur d'haletantes courses poursuites, ce thriller est remarquablement documenté. La responsabilité des japonais dans le conflit n'est pas éludée. Le passage sur les jeunesses hitlériennes est particulièrement instructif. Un manga magnifique.
L’Histoire des 3 Adolf, d’Osamu Tezuka
C'est l'occasion pour le visiteur de l'exposition de découvrir de magnifiques planches originales. Nous savions que Paul Gillon dessinait sur des planches aux dimensions impressionnantes, là nous pouvons en admirer un exemple.
Au
nom de tous les miens, de Paul Gillon et Patrick Cothias -
Partie de chasse de Pierre Christin et Enki Bilal
Jean-Marie Gourio et Philippe Vuillemin publient "Hitler = SS" en 1987. La Shoah est traitée sur le ton de l'humour noir. La polémique sera vive et le livre frappé d'interdiction.
Les récits des témoins se multiplient depuis les années 1980. Les auteurs de BD s'emparent du sujet de la Shoah et multiplient les angles de mémoire, tant dans le scénario que dans le dessin. L'artiste peut dorénavant exercer sa sensibilité et aide ainsi à transmettre la mémoire.
Les sujets se diversifient : montée de l’antisémitisme, lois raciales, déportation, spoliation des biens. D'autres génocides sont évoqués, arménien et tutsi. D'autres victimes sont citées : handicapés, gens du voyage, homosexuels.
La dernière partie de l'exposition prend le temps de détailler le sujet, le traitement, l'impact de nombreuses bandes dessinées. Une mine d'analyses pertinentes. Les ouvrages sont à la disposition du visiteur pour la lecture.
Une très belle exposition qui exerce notre esprit critique tout en régalant l'oeil.
Yossel - Joe Kubert
Lord Horror de John Coulthart, 1989
Shoah et bande dessinée - Memorial de la Shoah - Paris - du 19/01/2017 au 07/01/2018
Reviewed by Concerts expos by Pat
on
novembre 20, 2017
Rating:
Aucun commentaire
Enregistrer un commentaire