Solstice - Compagnie Blanca Li - Théatre national de Chaillot - Paris - du 21/09 au 13/10/2017

TRI SELECTIF
Blanca Li tente d'évoquer la force et la fragilité de la nature. Constat d'échec.

Après avoir vu le superbe spectacle du Nederlands Dans Theater en juin dernier (compte-rendu ici), il nous tardait de revenir au Théatre national de Chaillot. La chorégraphe Blanca Li proposant sa nouvelle pièce, Solstice, nous nous rendons sur place. Comme à notre habitude, nous ne révisons pas notre leçon, préférant ressentir le spectacle sans a priori et sans pensée prémâchée.


 
C'est notre seconde visite dans ce chef d'oeuvre d'architecture Art déco. Les lieux nous semblent déjà familiers. Nous empruntons le grand escalier de marbre qui descend dans les profondeurs de la colline de Chaillot. Nous nous restaurons d'un fort goûteux sandwich au Grand Foyer, face à l'immense baie vitrée qui offre une vue nocturne de la Tour Eiffel. Devant nous une mère et ses filles attendent l'ouverture de la salle en sautant à la corde. La sonnerie retentit, nous invitant à descendre encore jusqu'à atteindre la Salle Jean Vilar. Les travaux du mois de juin sont terminés et nous découvrons en chemin de nouvelles décorations.
Les photographies n'étant pas autorisées, ce compte-rendu ne comporte aucune image du spectacle (les photographies en noir et blanc, prises par Nico Bustos, sont issues du site internet du Théâtre).
 

 
La pièce démarre dans l'obscurité, avec en fond de scène des formes humaines derrière des plaques de plexiglas, créant une ambiance futuriste. Un immense baldaquin blanc descend sur l'ensemble de la scène. Les projections visuelles habillent ce baldaquin de lumières, finissant par l'embraser de rouge tel un foyer incandescent. La musique se fait tonitruante, percutante. Trois danseuses se démènent sur le baldaquin. Un percussionniste vient sur le côté droit de la scène ajouter encore au bruit à à la fureur. Sidération visuelle et sonore. Le calme revient. Quatorze interprètes se meuvent sous les voiles blanches, dans une illusion de nudité. La vaste tenture remonte. Les corps sont en fait habillés de justaucorps couleur chair pour les femmes et le torse nu pour les hommes. Des costumes pas toujours bien ajustés et qui donnent parfois l'impression de couches culottes. Les quatorze personnes s'expriment par des gestes primaires, des attitudes simples et des cris. Mais qu'expriment-elles ? Rythmes africains, tribu et cri primitif, sommes-nous à l'origine de l'humanité ? Sommes-nous à l'époque actuelle, avec une tribu isolée ? Sur scène ça bondit, ça court, ça sautille. Rien de gracieux à se mettre sous les yeux. Retour de la musique, tonitruante à nouveau. Ces rythmes, ces sonorités, tout est incroyablement daté à nos oreilles. La world music dans son incarnation la plus stérile. Le musicien revient, il a lâché ses percussions et attrapé une harpe-luth. Fort bien, c'est très joli le son de cet instrument malien. Et il chante. Pourquoi pas. C'est autrement plus agréable que la world music qui nous est servie. Le problème c'est que ce musicien n'est pas intégré dans la scénographie. Ses apparitions impromptues ne sont surclassées que par la soudaineté improbable de ses sorties de scène. Il faut dire que c'est à l'image du spectacle proposé. Nous peinons à apprécier ce qui se dévoile sous nos yeux, sans espérer y trouver un quelconque frémissement de l'esprit ou de l'âme. Voici maintenant un tableau avec d'immenses ventilateurs qui balaient la scène avec un vent latéral. Les interprètes sont vêtus de châles blanc et luttent dans la tempête. C'est fort joli. Sauf que ça s'étire à nouveau à l'infini. C'est long, mais long. La musique est assommante. L'ennui qui guettait nous a gagné. Retour à la pleine lumière, retour aux couleurs chair, retour aux cris, aux tannantes déambulations. De ci de là un interprète tente une belle figure, gracieuse, aérienne. Rien qui ne vienne cependant nous extraire d'une sensation de fatigue et d'un tenace sentiment de gâchis. Rien ou presque. Soudain la bouche d'un danseur vient se coller avec un bruit de ventouse à une partie du corps d'un autre. Chaque danseur fait de même. Un passage agréable, surprenant, amusant et rapide. Un instant de fraicheur bienvenu dans ce long spectacle.
Lors du final les interprètes jouent avec de la poudre noire qui se répand sur toute la scène. A nouveau la chorégraphie est barbante. Nous sommes accablés par tant de vaines longueurs.
 
C'est fini.
La salle applaudit, d'aucuns debout. Nous pas. Le sentiment de gâchis ne nous a pas quitté.

Il est temps d'attraper un livret et de lire les intentions de la chorégraphe. Nous apprenons que cinq gestes simples nous permettent d'agir concrètement pour la planète et sommes invités à suivre Blanca Li dans son engagement. La scénographie se voulait donc évocatrice de cinq domaines, air, océans, énergie, aliments et terre, et contributrice à l'effort de sensibilisation face à la préservation des populations et des équilibres naturels. Parfait, c'est bon et beau. Sauf que marteler le message n'aura servi ni à le rendre compréhensible lors du spectacle ni, et c'est bien le problème, à offrir une dose suffisante d'inventivité dans la chorégraphie proposée. Vive le tri, sélectif.


Solstice - Compagnie Blanca Li - Théatre national de Chaillot - Paris - du 21/09 au 13/10/2017 Solstice - Compagnie Blanca Li - Théatre national de Chaillot - Paris - du 21/09 au 13/10/2017 Reviewed by Concerts expos by Pat on octobre 29, 2017 Rating: 5

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