Bryan Ferry and Amelia Barratt - Florist

Bryan Ferry signe un album, Loose Talk, avec Amelia Barratt. Des textures sonores élégantes (Bryan, impeccable) et du mot parlé. La diction d'Amelia évoque la mécanique quotidienne (la porte ouverte, l'argent qui change de main, la camionnette). Du bel ouvrage. Nous pensons à Laurie Anderson (vous vous rappelez du manchot qui entre chez le fleuriste dans la chanson White Lily ?).

Le théâtre est fermé ce matin, mais dehors, il y a un fleuriste. Je l'observe emballer les tiges dans du papier et de la ficelle. Sans gants. L'arrière de la camionnette est ouvert et il a presque tout vendu. Toutes les vieilles tiges de la veille. Des cernes lui montent aux yeux, mais il se faufile entre les clients, entre les habitués les mains vides et les autres qui ouvrent leurs sacs. Comme un billet de banque glissé discrètement d'une main à l'autre. Il est mince, sans que cela se remarque, comme si personne n'attendait rien de plus ni de moins de lui. De si loin, je me pose des questions. Imaginez qu'un jour il rentre à la maison et me dise : « Je ne désire rien de plus que ça. » Il désigne les tulipes qui débordent d'un seau, entassées sur le siège passager de la camionnette, puis son tablier, puis son agenda vide. Et je réponds : « C'est parfait. Parfaitement bien. Parfaitement, sans avoir besoin de me le dire tout le temps. » Nous sommes dans l'allée. Je pousse la porte du porche, puis la porte d'entrée, et trois respirations plus tard, la porte de la salle de bain du rez-de-chaussée. Elle est préparée depuis un an. Sans peinture, je remonte la vitre à guillotine. Sentant la chaleur lancinante du moteur de la camionnette, je pleure et, comme il fait nuit, il peut me voir comme un écran.