Phil Rudd - Lex Koritni - L'Empreinte - Savigny-le-Temple - 21/04/2017 - Compte-rendu de concert - Concert review

TAPER DU PIED
Soirée hard rock australien à l'Empreinte avec Phil Rudd, légendaire batteur d'AC/DC.


La promesse d'une belle soirée de hard rock australien nous fait nous rendre à l'Empreinte à Savigny-le-Temple. Nous ne sommes pas venus dans cette salle depuis dix ans. C'était également pour une soirée de hard rock australien avec les mythiques Rose Tattoo (ici). Ce soir c'est Phil Rudd, légendaire batteur du groupe AC/DC, qui est à l'affiche.


Lex Koritni
La première partie est acoustique. Lex Koritni est le chanteur et fondateur du groupe australien Koritni. Le dernier album, "Night Goes On For Days", comporte plusieurs chansons acoustiques. Lex Koritni peut y faire un usage plus nuancé de sa voix en s'accompagnant lui-même à la guitare. Une expérience plus intime qui lui a visiblement beaucoup plu et qu'il propose ce soir sur scène. Lex Koritni est accompagné ce soir par un second guitariste et un percussionniste. Si nous ne sommes pas familier de la discographie de Koritni, nous identifions cependant "Seal The Deal", extrait du dernier album, ainsi que "Dance Mamma Dance". Les morceaux sont joués avec entrain. Quand acoustique rime avec puissance. Il faut dire que Lex Koritni a un gosier en acier que nous pouvons apprécier dans sa force brute. Le trio reprend un classique du rock australien avec "Beds Are Burning" de Midnight Oil. Le chanteur nous glisse en français dans le texte (il habite en France) que deux répétitions seulement auront suffi au trio pour préparer le concert de ce soir. Un temps très court qui n'empêche pas Lex Koritni de briller par la justesse de son chant comme sur le poignant "Red Light Joint". Le set se conclut avec une reprise du "Sweet Home Chicago" de Robert Johnson. Classique.




Que les puristes soient rassurés, Phil Rudd est venu avec son kit de batteries Sonor et ses cymbales Paiste. Le matériel trône sur scène, tandis que le public, composé de moultes chevelures grises, prend des selfies et entonne un antédiluvien chant de la pluie de Woodstock.

Phil Rudd
Légendaire batteur d'AC/DC, Phil Rudd a sorti un album solo en 2014, "Head Job". Des déboires judiciaires l'ayant juste après considérablement occupé, ce n'est que cette année que Phil Rudd peut enfin défendre sur scène les morceaux qu'il a composés. Il est accompagné des deux briscards présents sur l'album, Allan Badger au chant (qui joue aussi de la basse sur l'album) et Geoffrey Martin à la guitare. Pour soulager Allan sur scène, c'est John Proctor qui officie à la basse. Un deuxième guitariste, Mike "Mutt" Furness, vient assurer la guitare rythmique.



Le son est clair et très fort. Le nouvel album est à l'honneur. Peu de blabla. Seul le chanteur parlera. Et encore. Il est peu bavard le gars. En gros ça se limite à présenter les morceaux. C'est assez drôle car ça se transforme en routine : "le prochain morceau est... un extrait de l'album Head Job". De fait "Head Job" est un album de Rock' n' Roll simple et efficace. Un album pour les bars. Pour descendre bière après bière. "The Other Side" ouvre la soirée, suivi de "When I Get My Hands on You", avec un chouette refrain. Allan a une voix rude, enrouée, qu'il arrive à faire varier d'un morceau à l'autre entre âpreté et aigus. Si le terrain est connu, voire balisé, l'homme parvient à étonner avec de belles trouvailles mélodiques comme sur "Lost in America" ou "Crazy". Le jeu de scène est simple. Les mains d'Allan sont en constant mouvement et l'homme va régulièrement se dandiner à gauche de la scène (pour boire un verre d'eau en coulisse). Phil Rudd est implacable dans son jeu de batterie. Un puissant métronome. Son pote Geoffrey Martin assure les soli de guitare de manière propre, sans aucune esbroufe. Les deux autres larrons accompagnent poliment le trio de base. A part Phil Rudd, les musiciens ne sont pas des pointures, loin s'en faut. Mais il font le boulot. Il est clair que Phil Rudd a préféré s'entourer de copains pour la présente tournée. ça apporte au concert une certaine émotion. Nous ressentons dans cette petite salle, avec cette bande de potes, une sincérité particulière qui peine à percer dans les concerts millimétrés des grandes salles.




Allan Badger annonce "quelque chose du passé". C'est parti pour un morceau d'AC/DC de 1979. Parmi tant de pépites, Phil Rudd a choisi de jouer "Shot Down in Flames". Dans cette petite salle, c'est l'occasion comme jamais d'observer le jeu de Phil Rudd. Un jeu tout en retenue. Pas de démonstration, pas d'enjolivement. Il s'agit de rester simple. Tout est au service du groove. La batterie est là pour propulser le morceau. La frappe sur les cymbales vient renforcer la puissance du message en appuyant les mots-clefs du refrain. Le chanteur hurle "J'ai été descendu en flammes". Et "Crash !". La baguette s'écrase sur la cymbale sur le mot "Flammes". Les tympans explosent. Le chanteur s'égosille : "N'est-ce pas une honte ?". Et rebelote : "Crash !" fait la cymbale sur le mot "honte". Le son envahit le cerveau, malaxe les neurones. Une écrasante série de "crash" à la fin du refrain fait déferler des ondes sonores qui réduisent la matière grise en purée. Ne survit alors que le cerveau reptilien. Juste de quoi hocher la tête et taper du pied. Bigrement efficace. Retour à l'album "Head Job" avec le morceau "Sun goes down". Un superbe morceau aux influences seventies réjouissantes. Imaginez comment aurait sonné Hawkwind si Lemmy n'avait pas été viré du groupe. Vous y êtes ? Et bien c'est dans cet esprit, le tout avec un son de bar australien. Superbe. Le public salue les nouveaux morceaux avec la même fougue que les vieux standards. ça fait plaisir. Allan Badger nous annonce "Une autre du passé". C'est "Up to My Neck in You", issu de l'impeccable album "Powerage" d'AC/DC en 1978. Nous pensons bien sûr aux récents déboires judiciaires de Phil Rudd en entendant "J'ai été un imbécile et tu sais de quoi un imbécile est capable". Le Phil Rudd Band ne cherche pas à copier AC/DC. Allan chante comme il veut, comme il peut, sachant très bien qu'il ne peut pas approcher la voix de Bon Scott. Geoffrey Martin ne cherche à aucun moment à restituer la hargne du solo d'Angus Young. Il livre son solo et c'est très bien comme ça. Quant à Mike "Mutt" Furness, sa rythmique est à des années lumières du son vénéneux de la version originale. Et c'est tant mieux. Après tout ils existent des Tribute Band qui copient à la perfection les morceaux d'AC/DC. Phil Rudd n'est pas là pour ça. Il est là pour faire taper du pied.



Retour au rock costaud avec "No Right", sur lequel Phil Rudd nous propose une frappe syncopée inhabituelle et du plus bel effet. Le morceau "Repo Man" est bien en place, très représentatif du hard rock australien. "Head Job" est un remarquable brûlot, sans doute le meilleur titre de l'album. Rythmique implacable. Refrain épatant. Un sourire éclaire le visage impassible de Phil Rudd alors qu'il hurle le refrain dans son micro. Car oui Phil assure les choeurs à plusieurs reprises. Troisième et dernier titre d'AC/DC, "Rock 'n' Roll Damnation", issu également de l'album "Powerage". "Ils te disent que tu as a l'air fou. Chérie je suis fou de toi. Il disent que tu as l'esprit dérangé. Danse au rythme. C'est la damnation du rock'n'roll". Les paroles font également penser au récent passé du batteur légendaire. Phil Rudd l'a résumé lui-même lors d'une récente interview : "Je me suis tiré une balle dans le pied". Une arrestation très médiatisée en 2014 par la police néo-zélandaise. Une affaire qui a compromis sa participation à la tournée d'AC/DC et qui pourrait avoir abouti à son éviction définitive du groupe (qui vivra verra). Ont ensuite suivi huit mois d'assignation à domicile, une forte amende pour consommation de drogue et une crise cardiaque en début 2016. L'homme dit aujourd'hui avoir freiné ses excès. Il fait une tournée européenne pour défendre son album solo "Head Job". Cinquante dates. Dix huit pays. Phil Rudd est en train de réparer ce qui peut encore l'être. Loin, très loin, des stades immenses, Phil Rudd se frotte à l'intimité des clubs et des petites salles de concert, accompagné d'une bande de copains. Le groupe sort de scène et revient jouer en rappel le morceau "Forty Days", ultime extrait de l'album solo.
Phil Rudd, toujours aussi peu démonstratif, lève au final le bras, poing fermé.
Mission accomplie.

Faire taper du pied.





Setlist :

  1. The Other Side
  2. When I Get My Hands on You
  3. Lost in America
  4. Crazy
  5. Shot Down in Flames
  6. Sun Goes Down
  7. Up to My Neck in You
  8. No Right
  9. Repo Man
  10. Head Job
  11. Rock 'n' Roll Damnation
Rappel
  1. Forty Days

Phil Rudd - Lex Koritni - L'Empreinte - Savigny-le-Temple - 21/04/2017 - Compte-rendu de concert - Concert review Phil Rudd - Lex Koritni - L'Empreinte - Savigny-le-Temple - 21/04/2017 - Compte-rendu de concert - Concert review Reviewed by Concerts expos by Pat on avril 23, 2017 Rating: 5

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